Sunday, November 28, 2010

Interdiction de parler.

Normalement hier, pour la 84e fois, notre programme radiophonique "Contexte" devait passer en ondes. Nous avons décidé d’annuler l’émission, car l’évêque via une déclaration publique a interdit au groupe "AMERINDIA" toute action publique. Cette décision avait été rendue publique quelques jours avant mon retour en Bolivie après un congé en Belgique.
J’avais eu l’intention de reprendre le fil des Griffonnages des Andes, après une interruption de quelques mois, avec le # 192. Comme on vient de nous couper un canal de communication, j’ai une raison de plus pour le faire.

1. "AMERINDIA" est un petit groupe de réflexion composé de quelques laïques, d’un couple de religieux et prêtres qui se réunissent deux fois par mois pour échanger sur les événements concernant l’Église et la société. Aussi Geert Van Den Berge, curé à Oruro, appartient à ce groupe. Il y a quelques mois, nous avons pris l’initiative de partager nos réflexions et opinions avec un publique plus large via un programme hebdomadaire à la radio Pio XII.
Nous n’avons jamais prétendu parler au nom de l’Église locale. Bien que de temps en temps nous avons invité des personnes à venir nous parler de leur situation, de leurs réalisations ou problèmes : des gens d’Église, des enfants de la rue, des prisonniers, des travailleurs en développement, des autorités, des chefs d’organisations sociales ...Avec d’autres nous avons organisé des initiatives, comme une soirée mensuelle de réflexion avec le Comité Permanent des Droits de l’Homme, et dernièrement, avec CEPA, à l’initiative du Sanctuaire de la Vierge du Socavon, une foire du Livre Religieux, (mais l’évêque a interdit aux collèges catholiques la visite de cette foire inter-religieuse du livre).

2. "AMERINDIA" est aussi un travail de réseau au plan continental, existant dans plus de 20 pays, avec des groupes qui sont ouverts à des contacts oecuméniques et à un dialogue inter-religieux, et qui veulent garder vivant la richesse spirituelle des conférences épiscopales de l’Amérique latine. À cela nous participons. Dans l’interdiction de l’évêque, que nous avons appris par les journaux, il n’a pas été question du contenu des émissions; il se base sur le fait que nous n’avons pas fait connaître nos statuts et nos objectifs à l’évêque et que nous n’avons pas demandé la permission de fonctionner.
Maintenant, il est vrai que nous n’avons aucun statut et ne voulons pas être une "association" comme le définit le droit canonique. Nous sommes seulement un groupe informel de gens qui, à partir d’une inspiration évangélique et de traditions ecclésiales, veulent réaliser quelque chose au service de la société. Et quoi maintenant ? Nous continuerons à travailler à l’interne, entre autre, avec une recherche concernant la problématique socio-religieuse. Nous avons l’espoir que tout s’arrangera. Je vous tiendrai au courant. Dommage que nous devions mettre temps et énergie dans des affaires légalistes semblables. Mais c’est en même temps une opportunité de conscientiser.

3. Entre-temps en Bolivie, le processus de changement continu. Il est de plus en plus clair maintenant que c’est devenu un processus de redistribution : Qui doit maintenant contribuer et comment doivent être repartis les revenus de l’état? En politique, c’est comme ça que ça marche.
Et cela apporte des tensions et des déchirures, des pressions et des répressions, des divisions et de la corruption, et parfois (mais trop peu) du dialogue et de la consultation. La galette est devenue plus grande et on tend à améliorer le sort des plus faibles et des plus pauvres. Mais il y a encore tant à faire. On est encore trop occupé à élaborer des systèmes de contrôle via de nouvelles lois.

4. À mon retour, j’ai retrouvé notre CEPA ( Centro pour Écologie et Peuples Andins) en pleine action. Notre attention se porte toujours et avant tout vers le contrôle de la pollution de l’eau, de la terre et de l’air et à la recherche des alternatives et de la restauration. Moins visible mais aussi important est le travail au niveau socioculturel, avec les autorités traditionnelles et les dirigeants des communautés rurales et des communautés de quartier. Les Eco-jeunes viennent d’avoir leur congrès annuel et les Eco-femmes continuent à s’occuper du travail de formation et des petits travaux de recherche sur les situations concrètes journalières. Malgré l’Internet, la bibliothèque, le centre de documentation et les propres publications continuent de fournir de l’information alternative, surtout sur la problématique régionale.
Maintenant nous voulons planifier pour les mois et les années à venir, car, à de nouvelles questions nous voulons donner de nouvelles réponses.

5. Dans les années passées c’était surtout la problématique et les conflits sociaux, ethno- culturels et écologiques qui déterminaient notre agenda. Cela restera sans doute le cas mais maintenant dans un contexte inter-culturel; de visions mondiales; de dialogue inter-religions; de participation et de contrôle sociale; de célébrations; de rites et de mythes; de modèles de sociétés; d’opinions philosophiques et de convictions religieuses, ... Il est possible que nous allons rencontrer de l’opposition et peut-être même de la répression, mais nous l’accepterons. D’ailleurs... plusieurs personnes de CEPA participent aussi à AMERINDIA.

Gilberto Pauwels – Oruro.

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