Wednesday, January 28, 2009

La Bolivie décide.

Amigos,

C’est tranquille dans les rues. Non seulement devant la maison, où, hier, on a fait l’asphaltage mais aussi dans tout le pays, car aujourd’hui, seulement les véhicules de service avec une permission spéciale ont le droit de circuler. En effet, aujourd’hui aura lieu le référendum pour l’acceptation ou non de la nouvelle constitution. Le véhicule de CEPA circule avec à bord les journalistes de la Radio Pio XII et ceux du réseau national ERBOL.

1. Au fond, tous sont convaincus que la nouvelle constitution sera approuvée par une majorité ordinaire indiscutable. La question est plutôt à savoir quel sera le pourcentage. La chose est importante, non seulement pour tout le pays mais aussi pour chaque département.

Le gouvernement espère obtenir une majorité des 2/3. Cela pourrait inciter le gouvernement à prendre, sans hésitation, des mesures importantes, avant les élections, prévues seulement pour décembre 2009. Dans ce cas la tentation sera forte avec l’appui massif de la population de profiter de la victoire.

Déjà à l’avance l’opposition argumente qu’on peut seulement parler d’une éventuelle approbation si dans chacun des neuf départements la moitié des électeurs se prononcent pour le « OUI. »» Là où éventuellement il n’en sera pas ainsi, on peut s’attendre à de la résistance.

2. Un long processus a précédé cette journée décisive, caractérisé par une tension permanente entre le gouvernement d’Evo Morales et surtout la presse, la direction de l’Église et l’ambassade des USA. Mais le gouvernement n’a pas baissé les bras. Depuis la semaine dernière elle peut compter, à part de posséder son propre canal de télévision et un réseau de radios communautaires, sur son propre journal nommé : « Cambio » (« Changement »)

À la fin, la conférence épiscopale soulignait qu’elle visait seulement une participation consciente de la population au référendum, mais cela n’a pas suffit pour faire disparaître la perception que beaucoup d’évêques préféraient un vote pour le « NON. » Ils sont d’accord maintenant pour dire que le catholicisme ne peut plus être la religion officielle mais craignent un traitement de faveur pour les croyances et rites religieux des peuples autochtones. Par la force des choses il y a aussi les thèmes généraux de l’Église universelle en relation avec la sexualité, l’avortement et l’enseignement de la religion. Mais L’Église catholique s’est clairement distancée de la propagande, même à la télévision, qui disait que celui qui choisissait Dieu devait voter « NON. »

De l’Église de la base il y avait aussi des voix — mais généralement étouffées le plus possible — pour continuer à appuyer fermement l’actuel processus de changement, pour lequel la nouvelle constitution est un instrument important. D’importants acquis de l’Église latino-américaine sont en jeu : l’option de la préférence pour les pauvres, la revalorisation des cultures autochtones, le dialogue inter religieux, la collaboration à la construction d’une société plus juste, plus égalitaire et plus respectueuse de l’environnement.

3. Bientôt commencera le comptage des votes. Ce soir, les résultats globaux seront connus et diffusés dans la presse mondiale. C’est toujours un peu frustrant de voir que souvent on s’arrête là, pendant qu’en réalité, au cours des prochains jours les votes des régions éloignées seront acheminés. Concrètement cela veut dire que le pourcentage des votes pour le « OUI », qu’on connaîtra ce soir, pourrait monter de plusieurs points. Mais en générale la presse internationale ne s’y intéresse plus.

4. Entre-temps, le travail a de nouveau démarré à CEPA (Centre pour l’Écologie et Peuples Andins), après une vacance collective. L’évaluation est derrière nous. Avec une trentaine de personnes — des collaborateurs réguliers et des volontaires — nous avons tracé, la semaine dernière, les grandes lignes pour le travail de 2009. La semaine prochaine nous les fixerons en stratégies et actions concrètes. Dans cette 14e année de l’existence de CEPA, les attentes auxquelles CEPA doit répondre sont encore plus grandes que celles des années antérieures. Mais c’est seulement après le bain culturel des festivités du Carnaval, en février, qu’Oruro se mettra pleinement en marche.


Gilberto Pauwels
Oruro.

Saturday, January 3, 2009

Une revolution.

Bonjour tout le monde,

La fête de Noël a son égal dans les Andes dans la tradition du Pachakuti, une révolution qui rend un autre monde possible. En effet, pour nous, tout le pouvoir va à un nouveau-né, déposé du sein maternel dans la crèche d’une étable. Transposé à l’Altiplano cela signifie : quelque part dans un enclos pour animaux, sous un ciel étoilé, à terre, un enfant enveloppé dans un awayu (une mante pour porter des charges ou un enfant.) Non, ce n’est pas ça Noël !
Pour un émigrant, qui visite son ancienne communauté, il y aura toujours un peu de place dans une petite maison du village, faite d’adobes, sous un toit de paille et de bois de cactus. Mais vu de cette façon, on déplace l’importance de Noël.
Dans les villages des Andes, Noël est la fête des enfants. C’est aussi la période où se prépare l’échange des pouvoirs entre les autorités (jilaqata) des communautés (ayllu) qui a lieu au Jour de l’An.

1) Entre-temps, en Bolivie, le processus de changement trouve son chemin, lentement mais imparable. Le 25 janvier, la nouvelle constitution sera soumise à la population pour approbation. Une partie de l’opposition, qui favorise le «non», essaie de gagner au maximum les appuis de la presse et de l’Église. La stratégie des media est connue : exagérer ou taire la vérité, selon que l’un ou l’autre fait l’affaire pour ou contre. La hiérarchie exige — à juste titre — le droit d’être critique au niveau sociale, mais se laisse trop facilement embarquer par les adversaires du processus de changement. Ce que les évêques disent ou font, devient vite de l’eau au moulin de tous ceux, l’Église elle-même incluse, qui craignent de perdre des privilèges dans la nouvelle Bolivie. La base de l’Église qui n’est pas d’accord avec cette attitude, gronde et appuie la ‘révolution’. En effet, elle est soutenue par tant d’initiatives et de gens qui depuis longtemps se démènent pour la justice, pour la participation et l’égalité, contre l’exclusion et le racisme.
«Celui qui était dans l’étable ne retourne plus dans le palais d’Hérode» dit-on.

2) Pareillement pénible se déroule la ‘révolution’ dans le secteur minier. Dans le courant de l’histoire des Andes, l’exploitation des matières premières a coûté des millions de vies humaines, dues à la silicose et surtout à l’empoisonnement par le mercure. Il y a peu de temps encore, un mineur et une vie d’à peine quarante ans allaient ensemble. Transformer ce «mourir pour produire» en «produire pour vivre» demande des changements fondamentaux au niveau de la redistribution économique, de la préoccupation environnementale et le respect pour les droits socioculturels. L’augmentation des matières premières offrait de grandes opportunités mais elles sont demeurées, en grande partie, inutilisées. Les bénéfices extra ont été écrémés par les multinationales et maintenant que ça va moins bien, on menace avec des fermetures, du chômage et l’abandon des règles environnementales. En tant que CEPA, avec la PIEB (des programmes de recherches au niveau social), nous avons placé, pour 2009, six projets de recherche dans les blocs de départ ; au sujet de la santé publique, une technologie plus respectueuse envers l’environnement ainsi que la justice environnementale. Espérons qu’il nous restera du temps et de l’espace pour mettre les résultats en pratique.

3) Pour les organisations sociales, la période de fin d’année est bien occupée. Aussi CEPA (Centre pour l’Écologie et Peuples Andins) — qui fêtait son 13e anniversaire le 8 décembre — n’y échappe pas. Beaucoup de programmes et d’actions devaient être finalisés. Le moment était venu pour évaluer et faire des rapports et nous ne voulions pas tarder pour jeter un coup d’oeil dans le futur pour voir ce que 2009 pourrait nous réserver. Nous y avons dédié deux jours. Cette année, nous avons porté surtout notre attention aux dizaines d’organisations, associations, institutions, services publiques et travaux de réseaux dont nous faisons partie ou avec lesquels nous avons des ententes. Nous sommes venus à la constatation que finalement, nous ne faisons ou organisons plus rien tout seul. Même la bibliothèque participe à un réseau socioculturel et environnemental de centres de documentation. Début décembre, nous avons organisé un congrès avec plus de 120 participants, des délégués d’une trentaine d’organisations de jeunesse d’Oruro qui prennent l’environnement à coeur. Ils ont élu leur propre comité. De la même façon est né CORIDUP, une association de dizaines de communautés rurales qui se sentent menacées par l’exploitation minière. D’une façon ininterrompue, avec l’appui de CEPA, ils défendent leurs droits. Maintenir notre propre identité dans tout ça, en tant que CEPA, n’est pas une tâche facile. Y a-t-il un nom pour ça ? Un père nourricier ?

Je vous souhaite un temps de Noël qui a des senteurs de Paix par la Justice et une Année 2009 assoiffée d’égalité, de solidarité et d’honnêteté.


Fraternalmente,


Gilberto Pauwels

Oruro – Bolivia.