Friday, December 31, 2010

Une bolivie plurinational.

La république de la Bolivie n’existe plus. Maintenant la Bolivie est un état plurinational avec 36 nations. Mais un long chemin doit encore être parcouru pour mettre en pratique ce qui est inscrit dans la nouvelle constitution. Décolonisation et inter-culturalité sont maintenant les mots clés.

1. Pendant les derniers mois, on s’est pleinement occupé pour écrire et approuver les nouveaux textes de loi, qui doivent donner une forme, des normes et une structure à la nouvelle vision de la société. Les pensions, le racisme, la Mère Terre, l’enseignement, l’industrie minière, ...toutes les facettes de la société reçoivent leur jurisprudence et de plus des centaines de règlements doivent être adaptés à la nouvelle constitution. Il y a des sessions de travail et des consultations d’une façon permanente, mais à chaque fois il y a aussi des groupes dans la société qui se sentent lésés et qui protestent. Dans les organismes législatifs, où le parti MAS d’Evo Morales détient la majorité certains sujets sont traités en vitesse. Aux niveaux subalternes avec compétence législative (départementale, régionale, municipale, ou groupe ethnique) on s’active fébrilement à élaborer des textes de loi. En tant que CEPA, (Centre pour l’Écologie et Peuples Andins) nous avons des chances uniques d’y prendre part et de pouvoir intégrer l’environnement et les cultures.

2. Mais est-ce que le pluri-culturel à quelque chose à voir avec la vie de tous les jours ? Quelques petits exemples des derniers jours. Hier, le jour de Noël, Don Severino était le premier à venir nous voir. C’est l’homme qui, accompagné de son épouse, préside le rituel des Andes, chez nous à CEPA. Le sorcier en visite chez le missionnaire, aurait-on dit dans le passé. Il était venu pour une rencontre d’affaires mais l’occasion se prêtait pour reparler un instant de l’anniversaire de la fondation de CEPA (le 8 décembre), où, après avoir assisté à la messe célébrée par le Père Luciano, Don Severino avait présidé la "mesa" (la table, l’offrande) pour la Mère Terre. « Oui, je ne peux quand même pas laisser tomber la Mère Terre, je suis né d’elle et j’ai été nourri par ses seins » disait-il. Il racontait comment son père et son grand-père lui avait transmis les rites. « Ce sont des gestes intenses et parfois dangereux. Je les exécute avec prudence; on ne peut pas exagérer dans ça » affirmait-il. «Je le fais pour vous ici, dans la région, mais quand on m’invite ailleurs, je n’accepte pas. Je fais toujours tout au nom de Dieu qui m’a créé. »

3. Le premier appel téléphonique venait de Chipaya, avec les voeux de Noël de Sylvia, une soeur anglaise qui habite depuis quinze ans au milieu de ce petit groupe de gens qui sont convaincus qu’ils sont un peuple de survivants d’une humanité précédente, quand seulement la lune existait. Quand le soleil s’est levé, quelques-uns d’entre eux ont pu se sauver en sautant à l’eau. À l’origine, ils sont un peuple de pêcheurs, chasseurs et cueilleurs. Sylvia est déçue. La visite d’un couple de prêtres argentins traditionalistes (en soutane) ont découragé la communauté locale de toute initiative de fêter Noël.

4. Il y a quelques jours, j’ai été invité à l’assemblée annuelle des "malkus et jilaqatas", les autorités traditionnelles de la nation aymara de Carangas. Je me trouvais parmi 140 couples, tous et toutes avec des ponchos et des mantas vertes. Ils s’entretenaient sur le prochain développement de leur organisation. « 75 % de notre territoire a été reconnu par l’état comme territoire de la communauté » disaient-ils, « en tant que nation nous devons obtenir un territoire propre, avec autorité, non seulement sur les terres et les eaux mais aussi sur le souterrain.» Je ne pouvais pas en croire mes yeux et mes oreilles. Il y a 35 ans, je connaissais les jilaqatas seulement comme des dirigeants traditionnels soumis, dont on attendait surtout qu’ils mettent les membres de leurs communautés (ayllu) à la disposition des métis qui avaient en main les 12 villages principaux des Carangas. Dans ce temps-là, il y avait à peine contact entre les villages; maintenant la "provincia de los Carangas" ,du temps des Incas, est remise à l’honneur.
Pendant la réunion, on a rendu hommage à CEPA pour avoir, durant des années, mis ses locaux à la disposition de leur comité de direction, afin d’y tenir leurs réunions. Dernièrement, le président Evo Morales — qui appartient d’ailleurs à cette nation — a alloué à Jach’a Carangas (le Grand Carangas) une maison, tout proche d’ici. Un saut de géant.

5. Entre-temps, nous attendons toujours une réponse aux deux lettres envoyées à l’évêque où nous demandons un entretien en tant que groupe AMERINDIA. Il nous a jeté un interdit de parole. Nous aimerions lui expliquer que nous sommes seulement un petit groupe de base, qui se réuni pour analyser la réalité et l’actualité et partager nos opinions, via la radio et au moyen de débats, avec la population, sans vouloir être la voix de l’Église locale. Mais il paraît qu’il ne s’agit pas seulement du fait de ne pas avoir demandé la permission ou d’avoir omis de lui présenter des statuts, mais que nous osons prononcer les mots "décolonisation et dialogue inter-religieux " et que nous donnons la parole aux gens là-dessus. L’Église locale d’Oruro ( et d’ailleurs ...) essaie de faire un pas de géant en arrière, à la recherche de restauration, au milieu d’un processus de changement imparable. Un nouveau monde et une nouvelle Église sont non seulement nécessaire, mais indispensable.

6. Mais ... mettons tout cela provisoirement entre parenthèses. À partir de demain, il ne s’agira pas de pluri-nationalité mais, à nouveau, de l’état lui-même. Car aujourd’hui, le gouvernement a décrété une augmentation de 75 % du prix de l’essence et du diesel. On abolit la subsidiarité. Déjà depuis trop longtemps on a négligé ce problème. Cela signifie que d’un coup, non seulement le transport, mais tous les prix vont augmenter sensiblement. Pour demain, on a déjà annoncé une grève générale d’une durée indéterminée. Pour la première fois, le président Evo Morales et son gouvernement se dirigent avec une directive impopulaire vers une confrontation frontale avec le peuple. On peut s’attendre à ce qu’il soit obligé, dans une certaine mesure, à jeter du lest.

À vous tous et toutes, un temps de Noël rempli de Paix et une Heureuse Nouvelle Année.

Gilberto Pauwels.

Oruro Bolivia.

Sunday, November 28, 2010

Interdiction de parler.

Normalement hier, pour la 84e fois, notre programme radiophonique "Contexte" devait passer en ondes. Nous avons décidé d’annuler l’émission, car l’évêque via une déclaration publique a interdit au groupe "AMERINDIA" toute action publique. Cette décision avait été rendue publique quelques jours avant mon retour en Bolivie après un congé en Belgique.
J’avais eu l’intention de reprendre le fil des Griffonnages des Andes, après une interruption de quelques mois, avec le # 192. Comme on vient de nous couper un canal de communication, j’ai une raison de plus pour le faire.

1. "AMERINDIA" est un petit groupe de réflexion composé de quelques laïques, d’un couple de religieux et prêtres qui se réunissent deux fois par mois pour échanger sur les événements concernant l’Église et la société. Aussi Geert Van Den Berge, curé à Oruro, appartient à ce groupe. Il y a quelques mois, nous avons pris l’initiative de partager nos réflexions et opinions avec un publique plus large via un programme hebdomadaire à la radio Pio XII.
Nous n’avons jamais prétendu parler au nom de l’Église locale. Bien que de temps en temps nous avons invité des personnes à venir nous parler de leur situation, de leurs réalisations ou problèmes : des gens d’Église, des enfants de la rue, des prisonniers, des travailleurs en développement, des autorités, des chefs d’organisations sociales ...Avec d’autres nous avons organisé des initiatives, comme une soirée mensuelle de réflexion avec le Comité Permanent des Droits de l’Homme, et dernièrement, avec CEPA, à l’initiative du Sanctuaire de la Vierge du Socavon, une foire du Livre Religieux, (mais l’évêque a interdit aux collèges catholiques la visite de cette foire inter-religieuse du livre).

2. "AMERINDIA" est aussi un travail de réseau au plan continental, existant dans plus de 20 pays, avec des groupes qui sont ouverts à des contacts oecuméniques et à un dialogue inter-religieux, et qui veulent garder vivant la richesse spirituelle des conférences épiscopales de l’Amérique latine. À cela nous participons. Dans l’interdiction de l’évêque, que nous avons appris par les journaux, il n’a pas été question du contenu des émissions; il se base sur le fait que nous n’avons pas fait connaître nos statuts et nos objectifs à l’évêque et que nous n’avons pas demandé la permission de fonctionner.
Maintenant, il est vrai que nous n’avons aucun statut et ne voulons pas être une "association" comme le définit le droit canonique. Nous sommes seulement un groupe informel de gens qui, à partir d’une inspiration évangélique et de traditions ecclésiales, veulent réaliser quelque chose au service de la société. Et quoi maintenant ? Nous continuerons à travailler à l’interne, entre autre, avec une recherche concernant la problématique socio-religieuse. Nous avons l’espoir que tout s’arrangera. Je vous tiendrai au courant. Dommage que nous devions mettre temps et énergie dans des affaires légalistes semblables. Mais c’est en même temps une opportunité de conscientiser.

3. Entre-temps en Bolivie, le processus de changement continu. Il est de plus en plus clair maintenant que c’est devenu un processus de redistribution : Qui doit maintenant contribuer et comment doivent être repartis les revenus de l’état? En politique, c’est comme ça que ça marche.
Et cela apporte des tensions et des déchirures, des pressions et des répressions, des divisions et de la corruption, et parfois (mais trop peu) du dialogue et de la consultation. La galette est devenue plus grande et on tend à améliorer le sort des plus faibles et des plus pauvres. Mais il y a encore tant à faire. On est encore trop occupé à élaborer des systèmes de contrôle via de nouvelles lois.

4. À mon retour, j’ai retrouvé notre CEPA ( Centro pour Écologie et Peuples Andins) en pleine action. Notre attention se porte toujours et avant tout vers le contrôle de la pollution de l’eau, de la terre et de l’air et à la recherche des alternatives et de la restauration. Moins visible mais aussi important est le travail au niveau socioculturel, avec les autorités traditionnelles et les dirigeants des communautés rurales et des communautés de quartier. Les Eco-jeunes viennent d’avoir leur congrès annuel et les Eco-femmes continuent à s’occuper du travail de formation et des petits travaux de recherche sur les situations concrètes journalières. Malgré l’Internet, la bibliothèque, le centre de documentation et les propres publications continuent de fournir de l’information alternative, surtout sur la problématique régionale.
Maintenant nous voulons planifier pour les mois et les années à venir, car, à de nouvelles questions nous voulons donner de nouvelles réponses.

5. Dans les années passées c’était surtout la problématique et les conflits sociaux, ethno- culturels et écologiques qui déterminaient notre agenda. Cela restera sans doute le cas mais maintenant dans un contexte inter-culturel; de visions mondiales; de dialogue inter-religions; de participation et de contrôle sociale; de célébrations; de rites et de mythes; de modèles de sociétés; d’opinions philosophiques et de convictions religieuses, ... Il est possible que nous allons rencontrer de l’opposition et peut-être même de la répression, mais nous l’accepterons. D’ailleurs... plusieurs personnes de CEPA participent aussi à AMERINDIA.

Gilberto Pauwels – Oruro.

Thursday, March 11, 2010

Entre deux élections.

Hola Amigos/as,

Le Président Evo est très occupé ces derniers temps. Après les élections nationales, avec une victoire massive (plus de 64 %), il a nommé ses ministres et leurs collaborateurs, surtout les vice-ministres. En même temps, la campagne en vue des élections départementales et municipales, qui auront lieu le 4 avril (Pâques), s’est mise en marche. Particulièrement le choix des candidats lui a donné pas mal de maux de tête. Les candidats de gouverneur, maire et leurs conseils respectifs, dans beaucoup d’endroits, auront en effet la pleine sécurité d’être élus.

1. Quels sont les plus grands problèmes auxquels Evo doit faire face? En premier lieu, des divisions et séparations internes. Elles ne trouvent pas leur origine tant dans les différences idéologiques, que dans le choix des collaborateurs et des candidats. L’alliance du MAS avec le MSM ( Movimiento sin Miedo) de Juan del Granado est rompue; le MAS pense pouvoir se passer d’elle et se débrouiller seul. La question est de savoir si le MSM ne deviendra pas le havre de secours pour beaucoup de gens, en tant qu’individus ou en tant qu’organisations, qui se sentent marginalisés par le MAS, et qui ainsi, mettront en marche une sorte d’opposition à l’interne. Est aussi important la position critique grandissante des organisations ethniques, qui, à la mesure qu’elles ont appris à être partie prenante dans le processus de changement, exigent maintenant plus de participation. Elles veulent aussi qu’aux discours sur la Mère Terre, on y réponde par des mesures concrètes. Ces oppositions internes peuvent, à la longue, devenir plus importantes que le contrôle externe des partis traditionnels et des adversaires.

2. Un deuxième problème est la corruption. Le gouvernement veut l’endiguer de force, mais cela reste un problème difficile. Trop de groupes et de personnes sont devenus membres de l’appareil de l’état, non pas par conviction ou vision, mais simplement pour ratisser un morceau de la tarte, sur lequel ils pensent, pour une ou autre raison, avoir un droit ou avoir pu en obtenir un. Ce ne sont pas toujours les personnes les plus capables ou les plus motivées qui arrivent au bon endroit. La production grandissante de feuilles de coca dans le but d’exporter la cocaïne, fait partie de cette tendance vers l’illégalité.

3. Mais la question principale est de savoir ce que le président Evo et son entourage feront avec leur pouvoir presque imparable. Par exemple, plusieurs ont manifesté leur préoccupation sur le fait qu’Evo a nommé par décret de nouveaux juges, tandis que la constitution indique qu’ils doivent être élus par l’Assemblée Plurinationale (en d’autres mot, le Parlement). Ceci semble être un signal significatif, un antécédent qui demande de la vigilance.

4. C’est un fait qu’un processus de changement a été mis en marche qui est basé sur la participation, la redistribution, le respect pour les droits fondamentaux de l’homme et pour la diversité, que plus personne ne pourra arrêter. Mais peu à peu, il existe la conviction que le processus de changements est úne chose et que le gouvernement d’Evo est autre chose; et que les deux ne marchent pas nécessairement ensemble. Cela suscite des questions. Quelle contribution pouvons-nous faire en tant qu’Églises ou ONG-s ? Comment appuyer le processus de changement et les réalisations concrètes dans cette direction sans perdre notre fonction critique à l’intérieur de la société, à l’égard du gouvernement ainsi que de l’opposition ? En ce moment, je me trouve à Santa Cruz. Avec un certain nombre d’organisations, nous allons nous pencher sur cette problématique durant quelques jours.

5. Grâce à la campagne de carême de Broederlijk Delen, la Bolivie est un peu plus sur les lèvres en Flandre. Nous nous en réjouissons. Les changements climatiques et la problématique de l’eau qui en découle sont fondamentaux pour le futur du pays. Pour y faire face, tous seront appelés à contribuer, car ces problèmes pénètrent toutes les facettes de la vie. Ce sont les vrais ’ennemis communs’ que nous auront à combattre tous ensemble, au moins si nous croyons en ce rêve et à cette promesse vieille de plusieurs siècles qu’un ‘autre monde’ est possible, où ‘bien vivre’ sera assuré pour tout le monde.

Gilberto Pauwels

Oruro Bolivia.

Wednesday, January 20, 2010

Lignes de forces pour demain.

Amigas /os nuestras /os,

Quoi qu’il en soit, une nouvelle année est aussi un nouveau départ, même si beaucoup de démarches continuent simplement leur cours. En tant que CEPA (Centre pour l’Écologie et Peuples Andins), nous avons jeté un coup d’oeil derrière nous, mais surtout, nous regardons vers l’avant. L’an dernier fut une bonne année, avec des résultats palpables. Maintenant, 2010 se présente à nous, pleine d’opportunités et d’attentes.

Voici quelques lignes de forces comme des traces dans une plaine ouverte.

1) La proclamation, en zone d’émergence environnementale, du bassin des rivières et des plaines entre la région minière de Huanuni et le lac Uru-Uru et Poopó, grâce aux actions de CORIDUP, l’organisation des communautés rurales affectées, fut un coup de fortune et est maintenant un fait irrévocable. Mais de fait, c’est aussi notre plus grand défi pour la nouvelle année : continuer à appuyer CORIDUP et se battre pour que les trente pages pleines de promesses du décret se convertissent en actions concrètes.

2) Le commencement de l’audit environnemental concernant l’aurifère Inti Raymi, après de nombreuses années de démarches par les communautés rurales, appuyées par CEPA, fut une réussite, mais dans la queue le venin : à nos yeux, les exécutants et les contrôleurs ne garantissent pas pleinement une enquête transparente et indépendante. Ce que nous avions exigé et espéré, avec les communautés autochtones, pendant des années, nous n’avons pas pu le soutirer. Il va falloir être extrêmement vigilant, cette année. C’est maintenant ou jamais et il s’agit de la toute première enquête systématique concernant les conséquences environnementales d’une compagnie minière en Bolivie. Entre-temps, Inti Raymi a été vendu par le géant aurifère multinational Newmont à une entreprise nationale. Maintenant l’aurifère Newmont a quitté le pays. Quel héritage laisse-t-elle ?

3) Peu à peu, un mouvement en faveur de l’environnement se met en marche à Oruro de la part des jeunes, spécialement contre le plastique en ‘errance’ et pour une eau propre, contre les ordures et pour la verdure. La Mère Terre des Andes est sur une vague montante. Et ce n’est qu’un début. Donc nous continuons ... avec l’École pour Dirigeants environnementaux ; pour l’Eau : formation des professeurs, des expositions, le Mois Bleu d’Octobre (sur des problématiques concernant l’eau) et toutes sortes d’actions de conscientisation. L’an 2010 a d’ailleurs été proclamé par l’ONU «l’Année internationale de la Biodiversité et de Rencontres entre les Cultures », deux thèmes principaux de CEPA.

4) L’affluence dans les bibliothèques est menacée par l’Internet, dit-on, mais cela nous cause peu de tort. En effet, nous avons choisi de publier des livres sur la nature, sur la culture et les peuples de notre région, une information que l’on retrouve peu ailleurs. L’an dernier, CEPA, en collaboration avec d’autres, a publié neuf livres et petites publications (sur la pollution minière et ses remèdes possibles; sur la jurisprudence environnementale, sur la migration vers l’Espagne, sur la situation du lac Uru Uru; sur l’interaction entre les cultures; sur la réalité des différentes ethnies en Bolivie; le journal d’un soldat d’Oruro durant la guerre du Chaco; sur l’histoire de l’Inca). Si nous trouvons du temps et des fonds, nous organiserons cette année de petites bibliothèques ambulantes : des coffres remplis d’une centaine de livres circuleront dans les quartiers de la ville et les communautés rurales.

5) En ces temps-ci, on parle aussi beaucoup des adaptations aux changements climatiques. Presque toute la problématique du développement passe à travers le même entonnoir. Personnellement, je me pose des questions à savoir comment aborder ce thème ? Cette problématique n’est pas si nouvelle pour les gens. Depuis des siècles il y a eu de grands changements climatiques dans les Andes; une ou plusieurs années avec une sécheresse presque totale alternent avec de grandes inondations. Les ancêtres ont appris à vivre avec ce climat capricieux et ont développé de nombreuses techniques pour y faire face. Hé oui ! En effet, entre-temps beaucoup d’entre elles se sont perdues ... et probablement nous nous trouverons bientôt devant des phénomènes totalement nouveaux. Les soi-disant glaciers ‘éternels’ des Andes fondent.

6) Cette année nous voulons concentrer nos recherches sur les relations inter-ethniques afin de construire une société inter-culturelle sur la base d’une dignité égale entre les ethnies. Nous voudrons le faire à partir du groupe des Chipayas (le groupe ethnique le plus exclu) d’un côté, et de l’autre, les élites aymaras, eux-même originaires de la même région frontalière avec le Chili. Nous espérons ainsi contribuer à un meilleur entendement et accompagnement au processus actuel de changement en Bolivie, qui prône une certaine autonomie pour divers groupes ethniques.

7) L’année 2010 deviendra aussi l’année des modifications des lois. La ‘Réunion de l’État plurinational’ (ainsi s’appellera maintenant le parlement de la Bolivie), presque totalement renouvelée, a beaucoup de pain sur la planche pour adapter toutes les lois à la nouvelle Constitution. Il s’agit surtout maintenant de favoriser la participation des différents organes et assemblées aux consultations populaires où les opportunités sont données à formuler ou rejeter des propositions. Jusqu’à date, en tant que CEPA, nous collaborons au niveau de l’exploitation minière, de la foresterie à Oruro et de la réglementation environnementale.

8) Qu’est-ce qui pourrait être le plus grand renouveau cette année? Creuser en profondeur ! Il n’est pas suffisant de rester au niveau technique, socio-économique et juridique de l’actuel processus de changement. Si ce processus ne se réalise pas au niveau des visions, des spiritualités, des valeurs, des motivations, des attitudes, des symboles, ...tout pourrait s’en aller vers un vide et s’embourber. C’est à ce niveau plus profond que se manifestent les contradictions fondamentales et les opportunités laissées inutilisées. Un des instruments que nous voulons favoriser est la collaboration au groupe de réflexion et de communication ‘AMERINDIA’ d’Oruro, un groupe de gens qui veulent maintenir et favoriser, avec tous les moyens à leur disposition, un dialogue ouvert sur la société, les cultures, les visions mondiales et les religions.

Je vous souhaite, à toutes et tous, une intéressante année 2010, avec de nouvelles réponses aux questions nouvelles et éternelles.

Gilberto Pauwels

Oruro, Bolivia.