Tuesday, May 29, 2007

Les règles du jeu.

Un bonjour à chacun(e),

L’hiver est finalement arrivé (- 9 C° la nuit). Le ciel est couvert mais pas de neige en vue, même si cela est possible à la Pentecôtes. Car aujourd’hui c’est «l‘Espiritu» et dans les villages on fête la ‘croix verte’ agraire.

1- Sur le plan social le gouvernement d’Evo Morales réussit à éteindre les plus grands foyers de troubles, mais il y a toujours des conflits à quelque part, où on veut exiger une réponse immédiate via des blocages de routes ou des manifestations. C’est surtout entre le gouvernement et le pouvoir juridique que la tension est grande à propos des nominations.
Le plus grand succès récent est sans doute la ‘nationalisation’ ou le rachat de deux raffineries de pétrole de Petrobras (Brésil) au prix de vente d’il y a quelques années. Cela signifie une augmentation immédiate des revenus de l’état. Par contre, sur le plan de la réorganisation de l’industrie minière, il y a eu peu de progrès. Néanmoins, que l’ex-ministre de l’industrie minière, Guillermo Dalence, ait été récupéré et nommé gérant de la COMIBOL à Oruro, fut reçu ici positivement.
Concernant la nouvelle constitution, personne ne croit plus à son aboutissement pour la date de la fête nationale (6 août). Le parti au pouvoir (MAS) veut bien accélérer les choses mais l’opposition a le pied sur le frein. Les engueulades et chamailleries apparentes cachent souvent une stratégie beaucoup plus subtile pour freiner l’autre. Ce sur quoi on est en accord, c’est que les textes de lois doivent refléter la diversité culturelle de la Bolivie. Chacun veut établir de nouvelles règles du jeu mais entre-temps on doit continuer à fonctionner avec les anciennes.

2- Il y a plus de deux ans qu’on discute sur les modalités de l’enquête concernant les conséquences pour l’environnement de l’exploitation minière d’Inti Raymi. Maintenant on est proche d’un accord, mais à plusieurs reprises déjà, la compagnie a demandé un délai pour la signature définitive du contrat. Le fait que les actionnaires de la multinationale Newmont (USA; propriétaire d’Inti Raymi), lors de leur assemblée annuelle, ont demandé une enquête sur la façon dont la compagnie se comporte, avec les communautés locales partout dans le monde, dans ses exploitations minières, (pollution, responsabilités sociales, respect de la culture, …), est sans doute un appui pour les communautés plaignantes d’ici.

3- En tan que CEPA, ce n’est pas le seul conflit environnemental qui nous préoccupe. La compagnie chimique SAMCO — dans notre rue — recevra probablement, malgré toutes les protestations des habitants avoisinants, la permission de reprendre la production d’acide sulfurique. La semaine passée, les gens ont bloqué les rues en guise de protestation.
Une fois de plus, les fermiers de Challapata ont fait comprendre, avec une manifestation, qu’ils s’opposent à une exploitation aurifère dans leur région.
Les propriétaires d’une exploitation minière proche du village de Poopó, sont venu nous demander de l’aide dans le but de convaincre les ‘campesinos’ de leur donner la permission d’exploiter une mine d’argent-plomb-zinc. Ils avaient déjà entrepris sur place une visite d’inspection, conjointement avec la population. Il s’agit de la colline d’où provient l’eau potable du village de Poopó … Un journaliste est venu me porter des informations sur deux compagnies qui polluent la ville d’Oruro. Une d’elle a été expulsée d’El Alto (La Paz), après qu’on eut constaté une intoxication au plomb chez les enfants dans le voisinage de la mine …
Il est impossible pour nous de surveiller tout. Il s’agit surtout de contribuer à ce que les gens, non seulement connaissent les lois (règles du jeu), mais aussi que celles-ci soient respectées et de préférence, améliorées en même temps.

4- Un fait remarquable : cette semaine, à Chipaya, on a remis les documents de personnalité civile à la nation Uru. Elle est constituée de trois groupes : les Chipayas, les Muratos (à Oruro) et les Iruitos (à La Paz). Au cours des dernières années, ils ont maintenu des contacts réguliers entre eux et maintenant cette union a été ratifiée officiellement. En tant que CEPA, nous les aidons à conserver leur identité propre ainsi que le lien avec leurs ancêtres en créant des ‘casas de cultura’ dans les villages (Chipaya, Ayparavi et Llapallapani). Pour Johan Claeys (de Nieuwpoort, Flandre), c’était un premier contact avec les Chipayas. En tant que bénévole de Broederlijk Delen et anthropologue, il vient collaborer pour quelques mois, dans le but d’acquérir une meilleure connaissance sur le lointain passé d’Oruro. Sans doute, cela mènera à la conclusion que les Urus — actuellement, le groupe ethnique le plus petit, le plus pauvre et le plus exclu — ont eu un apport beaucoup plus grand et important dans l’histoire d’Oruro. Il s’agit d’un fait, que jusqu’à date, l’on n’était pas prêt à accepter

À vous tous, une petite «langue de feu» chauffante de Pentecôtes.

Gilberto

Wednesday, May 2, 2007

'Griffonnages portes-ouvertes'

Amigos nuestros,

Pour faire changement, voici un ‘Griffonnages portes-ouvertes’ sur les faits et gestes de quelques personnes à CEPA (Centre pour l’Écologie et Peuples Andins). Mais d’abord un petit coup d’oeil sur un pays sous pression.

1- Ce n’est pas de tout repos de gouverner avec les organisations populaires. Deux des plus grands groupes au niveau national sont actuellement mobilisés pour extorquer des concessions : l’enseignement et la santé.
À nouveau, les mineurs s’opposent aux membres des coopératives minières. Cinquante autobus remplis de mineurs partaient hier de Huanuni à Sucre pour empêcher à nouveau l’entrée des coopératives dans leur centre minier.
Des milliers de gens qui vivent de l’importation et la vente des vêtements usagés font face à des milliers d’autres qui veulent vivre de la production du textile. En effet, le gouvernement a défendu l’importation des vêtements usagés pour protéger l’industrie nationale.
Des personnes avec un handicap physique occupent les rues pour obtenir une allocation de l’État. Même de temps en temps on bloque les chemins et les routes nationales pour des revendications très locales. Mais malgré tout, le train est en marche : le processus enclenché d’émancipation est irréversible.

2- « Le vice-ministre pour l’environnement semble être un employé de CEPA. » : c’est ce qu’on ont fait paraître, dans le journal local, il y a de ça quelques jours, les mineurs de la mine aurifère Inti Raymi. Ils n’ont pas du tout aimé que le ministère ait donné raison aux communautés rurales, dirigées par EMILIO. En effet, quelque chose ne marche pas avec l’audit environnemental qui doit mesurer les dommages causés par les activités minières à leurs terres et à l’eau. Ensemble, une nouvelle proposition a été élaborée. La seule entre les parties concernées qui refuse maintenant de signer est …Inti Raymi, car dans les faits, ils perdent le contrôle sur l’enquête qui doit les contrôler.
Par l’intermédiaire de CEPA, EMILIO et ANGELA ont réussi à regrouper les communautés autochtones qui vivent autour du lac Uru et Poopó ainsi que dans le bassin de la rivière Desaguadero, dans une ‘coordinadora’ pour défendre ensemble leurs droits (CORIDUP). Cela est ressorti encore hier, dans un séminaire régional à l’université sur le futur de l’exploitation minière à Oruro. Les communautés agraires et CEPA étaient les seuls qui ont mis sur le tapis la problématique environnementale.

3- La semaine passée, pour la première fois, MARCELO a réuni les responsables des ‘casas de cultura’ (centres culturels), qui, entre-temps, ont été organisés dans sept villages andins. Cela devient tout un défi de les faire marcher avec toutes sortes d’activités. En même temps, il a lancé un concours pour des étudiants en anthropologie au sujet de ce que nous appelons « la migración pendular », le continuel va-et-vient entre le village et la ville ou ailleurs. Pour les élèves des écoles secondaires le concours est organisé sur l’histoire de leur quartier ou village.
Mais l’activité la plus importante de Marcelo sera probablement un cours du soir et de fin de semaine sur ‘l’inter culturalité et le développement durable’ à l’intention d’une trentaine de chercheurs sociaux. L’université fournira un diplôme et aujourd’hui nous recevions l’annonce officielle que l’ambassade de Belgique va coopérer dans les frais.

4- GERMAN n’est pas à ses premiers d’essais. La collecte municipale des ordures sera organisée dans plus de villages, entre autres, à Orinoca, le village natal d’Evo Morales. Actuellement, la première préoccupation de German consiste à organiser la dixième ‘Foire de la Biodiversité’, où les élèves des collèges ruraux viennent exposer en ville leurs richesses culturelles et écologiques. Cette année, la préfecture participe aussi, mais la mairie s’est désistée, car quelques personnes sur place trouvaient que la foire était un peu trop ‘originario’ (indien). Par contre LIDEMA et Pastorale Sociale-Caritas seront de la partie.
LIDEMA (Ligue pour la défense de l’environnement) est un réseau d’organisations environnementales. La semaine passée j’ai assisté à la réunion annuelle à Sucre pour y présenter la demande de CEPA de devenir membre. C’est un plaisir aussi de voir German qui pense déjà à l’année prochaine. En effet, 2008 sera l’année de la pomme de terre. Samedi prochain, il achètera à la grande foire annuelle toutes les variétés possibles de la pomme de terre. L’intention est de les planter pour obtenir du matériel d’exposition l’an prochain, ainsi que de l’étoffer avec quelques études techniques comparatives concernant la production etc.

5- Alicia s’est lancée dans l’éducation environnementale. Samedi prochain se terminera un cours de fins de semaine pour 30 professeurs sur l’enseignement environnemental, et sur ces entrefaites, un cours semblable a débuté pour le corps professoral au complet d’une école secondaire. La conséquence de tout cela est que notre centre de formation à Chuzekery reçoit régulièrement la visite de classes. Et là c’est la responsabilité de LIMBERT qui entre en jeu. Il est originaire du village aymara de Corque, étudiait la pédagogie à Cochabamba, s’est trouvé sans travail et juste à temps nous avons pu éviter qu’il émigre, par la force des choses, à Tarija.

6- Par contre, ELY part pour La Paz. Pendant huit ans, elle a mis de l’enthousiasme et du contenu dans CEPA. Elle demeure une collaboratrice externe (comme SANDRA et RICARDO) et va étudier …la théologie, même la théologie protestante, mais cela dans l’option de la justice et du patrimoine culturel. EVA pour sa part continuera les activités avec les femmes bergères du bassin de la rivière Desaguadero, un groupe social de personnes démunies qui en plus doivent faire face à des problèmes de contamination environnementale. BEATRIZ, anthropologue et femme aymara, est allé vivre un bout de temps avec ces bergères. « De toute ma vie, je n’ai jamais vécu une chose aussi difficile » était son commentaire.

7- Le travail dans la bibliothèque de CEPA a convaincu VIVIANA (Turco), autant que FRANCISCA (Chipaya), d’entreprendre des études en anthropologie. Ces jours-ci, elles feront le tour des différentes facultés de l’université avec des affiches et prospectus dans le but de faire connaître la richesse bibliographique de leur bibliothèque ainsi que de la librairie CORREOS-CEPA de WILMA et MONICA, dans l’ancien bureau de poste.
D'autres personnes sont liées à CEPA : FRANKLIN, JOHNY, ANGEL et ISABEL, VIVIANA et LILES, OSCAR, CESAR, et à moindre mesure les groupes Eco-mujeres et Eco-jovenes, chacun(e) selon sa manière, avec un engagement et enthousiasme qui peuvent être plus fragiles que cela paraît à première vue. C’est un peu semblable au processus d’émancipation vécu par tout le pays actuellement, que nous considérons toujours comme irréversible.


Gilberto.