Wednesday, January 20, 2010

Lignes de forces pour demain.

Amigas /os nuestras /os,

Quoi qu’il en soit, une nouvelle année est aussi un nouveau départ, même si beaucoup de démarches continuent simplement leur cours. En tant que CEPA (Centre pour l’Écologie et Peuples Andins), nous avons jeté un coup d’oeil derrière nous, mais surtout, nous regardons vers l’avant. L’an dernier fut une bonne année, avec des résultats palpables. Maintenant, 2010 se présente à nous, pleine d’opportunités et d’attentes.

Voici quelques lignes de forces comme des traces dans une plaine ouverte.

1) La proclamation, en zone d’émergence environnementale, du bassin des rivières et des plaines entre la région minière de Huanuni et le lac Uru-Uru et Poopó, grâce aux actions de CORIDUP, l’organisation des communautés rurales affectées, fut un coup de fortune et est maintenant un fait irrévocable. Mais de fait, c’est aussi notre plus grand défi pour la nouvelle année : continuer à appuyer CORIDUP et se battre pour que les trente pages pleines de promesses du décret se convertissent en actions concrètes.

2) Le commencement de l’audit environnemental concernant l’aurifère Inti Raymi, après de nombreuses années de démarches par les communautés rurales, appuyées par CEPA, fut une réussite, mais dans la queue le venin : à nos yeux, les exécutants et les contrôleurs ne garantissent pas pleinement une enquête transparente et indépendante. Ce que nous avions exigé et espéré, avec les communautés autochtones, pendant des années, nous n’avons pas pu le soutirer. Il va falloir être extrêmement vigilant, cette année. C’est maintenant ou jamais et il s’agit de la toute première enquête systématique concernant les conséquences environnementales d’une compagnie minière en Bolivie. Entre-temps, Inti Raymi a été vendu par le géant aurifère multinational Newmont à une entreprise nationale. Maintenant l’aurifère Newmont a quitté le pays. Quel héritage laisse-t-elle ?

3) Peu à peu, un mouvement en faveur de l’environnement se met en marche à Oruro de la part des jeunes, spécialement contre le plastique en ‘errance’ et pour une eau propre, contre les ordures et pour la verdure. La Mère Terre des Andes est sur une vague montante. Et ce n’est qu’un début. Donc nous continuons ... avec l’École pour Dirigeants environnementaux ; pour l’Eau : formation des professeurs, des expositions, le Mois Bleu d’Octobre (sur des problématiques concernant l’eau) et toutes sortes d’actions de conscientisation. L’an 2010 a d’ailleurs été proclamé par l’ONU «l’Année internationale de la Biodiversité et de Rencontres entre les Cultures », deux thèmes principaux de CEPA.

4) L’affluence dans les bibliothèques est menacée par l’Internet, dit-on, mais cela nous cause peu de tort. En effet, nous avons choisi de publier des livres sur la nature, sur la culture et les peuples de notre région, une information que l’on retrouve peu ailleurs. L’an dernier, CEPA, en collaboration avec d’autres, a publié neuf livres et petites publications (sur la pollution minière et ses remèdes possibles; sur la jurisprudence environnementale, sur la migration vers l’Espagne, sur la situation du lac Uru Uru; sur l’interaction entre les cultures; sur la réalité des différentes ethnies en Bolivie; le journal d’un soldat d’Oruro durant la guerre du Chaco; sur l’histoire de l’Inca). Si nous trouvons du temps et des fonds, nous organiserons cette année de petites bibliothèques ambulantes : des coffres remplis d’une centaine de livres circuleront dans les quartiers de la ville et les communautés rurales.

5) En ces temps-ci, on parle aussi beaucoup des adaptations aux changements climatiques. Presque toute la problématique du développement passe à travers le même entonnoir. Personnellement, je me pose des questions à savoir comment aborder ce thème ? Cette problématique n’est pas si nouvelle pour les gens. Depuis des siècles il y a eu de grands changements climatiques dans les Andes; une ou plusieurs années avec une sécheresse presque totale alternent avec de grandes inondations. Les ancêtres ont appris à vivre avec ce climat capricieux et ont développé de nombreuses techniques pour y faire face. Hé oui ! En effet, entre-temps beaucoup d’entre elles se sont perdues ... et probablement nous nous trouverons bientôt devant des phénomènes totalement nouveaux. Les soi-disant glaciers ‘éternels’ des Andes fondent.

6) Cette année nous voulons concentrer nos recherches sur les relations inter-ethniques afin de construire une société inter-culturelle sur la base d’une dignité égale entre les ethnies. Nous voudrons le faire à partir du groupe des Chipayas (le groupe ethnique le plus exclu) d’un côté, et de l’autre, les élites aymaras, eux-même originaires de la même région frontalière avec le Chili. Nous espérons ainsi contribuer à un meilleur entendement et accompagnement au processus actuel de changement en Bolivie, qui prône une certaine autonomie pour divers groupes ethniques.

7) L’année 2010 deviendra aussi l’année des modifications des lois. La ‘Réunion de l’État plurinational’ (ainsi s’appellera maintenant le parlement de la Bolivie), presque totalement renouvelée, a beaucoup de pain sur la planche pour adapter toutes les lois à la nouvelle Constitution. Il s’agit surtout maintenant de favoriser la participation des différents organes et assemblées aux consultations populaires où les opportunités sont données à formuler ou rejeter des propositions. Jusqu’à date, en tant que CEPA, nous collaborons au niveau de l’exploitation minière, de la foresterie à Oruro et de la réglementation environnementale.

8) Qu’est-ce qui pourrait être le plus grand renouveau cette année? Creuser en profondeur ! Il n’est pas suffisant de rester au niveau technique, socio-économique et juridique de l’actuel processus de changement. Si ce processus ne se réalise pas au niveau des visions, des spiritualités, des valeurs, des motivations, des attitudes, des symboles, ...tout pourrait s’en aller vers un vide et s’embourber. C’est à ce niveau plus profond que se manifestent les contradictions fondamentales et les opportunités laissées inutilisées. Un des instruments que nous voulons favoriser est la collaboration au groupe de réflexion et de communication ‘AMERINDIA’ d’Oruro, un groupe de gens qui veulent maintenir et favoriser, avec tous les moyens à leur disposition, un dialogue ouvert sur la société, les cultures, les visions mondiales et les religions.

Je vous souhaite, à toutes et tous, une intéressante année 2010, avec de nouvelles réponses aux questions nouvelles et éternelles.

Gilberto Pauwels

Oruro, Bolivia.